Loin d'être une pause, le "Grand Arrêt" du vapocraqueur sur la plateforme Ineos de Lavéra est synonyme d'une intense activité. Depuis mi-septembre, ce chantier réglementaire, qui a lieu tous les 5 à 7 ans, voit les effectifs du site tripler, passant de 500 salariés à près de 2000 personnes avec l'arrivée de 1500 employés d'entreprises locales. Un projet colossal, préparé depuis deux ans, essentiel pour la maintenance, la modernisation et l'avenir écologique du géant de la pétrochimie.

 

Un moteur économique majeur pour le territoire

 

Ce Grand Arrêt est avant tout une formidable bouffée d'oxygène pour l'économie locale. Avec un investissement global de plusieurs dizaines de millions d'euros, l'événement fait appel à des dizaines de corps de métiers issus de notre territoire. Pour de nombreuses entreprises partenaires, c'est un rendez-vous crucial.

Jean-Philippe Blanc, directeur d'agence pour Soprovise, qui installe 4000 tonnes d'échafaudages, le confirme : « C'est important pour pérenniser l'entreprise. Notre avenir dépend des prestations que l'on produit ». Pour sa PME, ce contrat représente 20% de son chiffre d'affaires annuel. De même pour Clemessy services, filiale du groupe Eiffage, qui voit dans ce marché une opportunité de réaffirmer son ancrage historique dans la pétrochimie locale.

 

Au-delà de la maintenance : un enjeu écologique et technologique

 

Si l'objectif premier est d'inspecter et de nettoyer les installations, Ineos profite de cette opération pour mener des projets de modernisation ambitieux. L'un des plus complexes est le remplacement de la "boîte froide", un équipement cryogénique de 20 mètres de long qui liquéfie l'éthylène à -100°C.

« C'est l'équipement le plus complexe de la chimie », souligne Guy Pascuito, chargé d'affaires. Ce remplacement permettra, selon la directrice générale Alexandra Loewenstein, d'améliorer « l'efficacité énergétique » du site. Une démarche qui s'inscrit dans la continuité des efforts du groupe, qui a déjà fortement diminué ses émissions de gaz à effet de serre et vise de nouvelles baisses d'ici 2030.

 

Sécurité et Logistique : les "Jeux Olympiques" de l'Industrie

 

Organiser un tel afflux de personnel et de matériel est un défi logistique immense, souvent comparé en interne aux "Jeux Olympiques" de l'industrie. La sécurité est le mot d'ordre prioritaire. Pas moins de 5000 heures de réunions d'information et de formation ont été menées en amont pour s'assurer que chaque intervenant maîtrise les règles.

Un véritable village temporaire a été érigé sur le site pour accueillir les équipes :

• 260 bungalows pour les bureaux, vestiaires et douches.

• Une infirmerie et un magasin de sécurité dédiés.

• Des parkings supplémentaires et des navettes pour gérer les flux.

• 250 grues, engins de levage et semi-remorques circulant en permanence.

Même la restauration a dû s'adapter. William Dzierwa, de la société Élior, va non seulement augmenter sa production de repas mais aussi gérer un food-truck pour la première fois, afin de servir les équipes au plus près des zones de travail.

 

L'Humain au cœur du chantier

 

Malgré la pression et la complexité technique, l'aspect humain reste central. « On tisse entre nous des liens semblables à ceux d'une grande famille », confie Franck Garriga, chef de projet chez Clemessy services.

Pour Odile Josse, responsable du grand arrêt 2025, la période est intense : « Cela nous demande une grande concentration et une rigueur absolue ». Une fierté partagée par tous, jusqu'aux équipes de restauration. « La pause du midi est très importante pour les travailleurs, et notre équipe est fière d'y contribuer », ajoute le cuisinier William Dzierwa. Un effort collectif colossal pour préparer l'outil industriel aux défis de demain.