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Justice
Marseille : prison ferme requise contre un ancien boucher-charcutier devenu marchand de sommeil3min
Par Maritima 15/03/2025 à 09:30
Quatre ans de prison dont un an ferme ont été requis vendredi contre un ancien boucher-charcutier marseillais devenu marchand de sommeil, accusé par le parquet d'avoir bâti sa fortune sur "l'exploitation de la misère humaine".
Aux yeux du ministère public, cet homme de 85 ans jugé notamment pour soumission de personnes vulnérables à des conditions d’hébergement incompatibles avec la dignité humaine était devenu "un des plus gros marchands de sommeil de Marseille" avec sa soixantaine de logements dans les quartiers paupérisés du centre-ville.
"À Noailles, un des quartiers les plus pauvres de France, ce sont de nouveaux alchimistes, ils prennent la pierre en péril et la transforment en or", a accusé vendredi matin le procureur Guillaume Bricier, citant l'exemple d'un immeuble acheté 120.000 euros qui lui aura rapporté près de 800.000 euros.
Des revenus principalement tirés de l'aide personnalisée au logement (APL) versée par la CAF aux locataires, soigneusement sélectionnés par Raphaël Zennou sur ce critère, a souligné le magistrat, pour qui "la construction du patrimoine immobilier" du prévenu s'est faite "sur l'argent de la solidarité nationale".
Renvoyant le tribunal aux photos édifiantes prises par les enquêteurs, le procureur a ajouté son propre témoignage, dans un ancien hôtel meublé transformé en studios, où "les habitants mettaient leurs vêtements dans des sacs plastiques dans le frigo pour lutter contre l'humidité et contre les rats".
À la barre, une locataire de M. Zennou avait elle raconté comment son bébé "était arrivé dans l'humidité, dans les rats, dans l'insalubrité, et ça a duré pendant quatre ans". Privée d'eau chaude, elle faisait chauffer à la casserole l'eau pour laver son nourrisson.
"Ils doivent payer"
Les seules infractions reconnues par Raphaël Zennou --"deux ou trois petites erreurs", a-t-il concédé-- concernent l'exigence des loyers dans un immeuble pourtant frappé par des arrêtés de péril.
À un policier qui lui avait rappelé cette interdiction au téléphone, M. Zennou avait rétorqué: "Si les locataires sont assez bêtes pour payer, moi je ne leur rendrai pas leur argent". Sur son procès-verbal, l'enquêteur avait évoqué une autre phrase, de son épouse Sarah Zennou: "On n'a plus de sous, on a fait des travaux, ils doivent payer!", avait-elle affirmé
Au-delà de l'amende de 75.000 euros infligée au le prévenu, le procureur a également requis la confiscation de plusieurs logements et de sommes saisies sur ses comptes ou ceux de ses deux SCI, pour un total supérieur à un million d'euros.
Une peine de trente mois de prison avec sursis et une amende de 50.000 euros ont été requises contre Sarah Zennou, 81 ans, l'épouse du retraité, qui était chargée de l'administration. Des amendes de 100.000 et 300.000 euros ont été réclamées aux deux SCI familiales propriétaires de la majorité des biens.
"Cette affaire m'a mis une gifle. À 85 ans, je ne veux pas continuer", a réagi le prévenu vendredi, à la toute fin de l'audience, annonçant son intention de "tout vendre le plus tôt possible": "Dommage, car les locataires, c'est ma vie", a-t-il ajouté.
Mettant l'accent sur l'âge de son client, "ce qui ne l'exonère pas de tout", son défenseur, Me Fabrice Giletta, a invité le tribunal à ne pas faire de ce dossier un exemple "au titre de la lutte contre l'habitat indigne": "Quelles que soient les erreurs et les fautes commises, il ne mérite pas (d'être) exposé à des sanctions aussi sévères".
Reconnaissant que cette affaire emblématique arrive "un peu tard", le procureur a souligné que les prévenus "n'ont pas fait amende honorable": "D'accord, il a 85 ans, mais il a exploité la misère pendant trente ans et (...) la justice doit dire qu'il ne pouvait pas faire cela".
Le jugement a été mis en délibéré au 12 mai.
© Agence France-Presse (par L. Leroux)
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