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Justice
Au procès pour blanchiment du "Petit Bar", la mécanique financière passée au crible3min
Par Maritima 30/04/2025 à 06:56
Au deuxième jour des réquisitions au procès du réseau de blanchiment de la bande criminelle corse du "Petit Bar", les procureurs ont passé au crible mardi le nébuleux mécanisme financier utilisé, via des sociétés étrangères et des hommes d'affaires fortunés, pour "blanchir" l'argent sale du clan.
Depuis le 24 février, 24 prévenus sont jugés devant le tribunal correctionnel de Marseille pour blanchiment aggravé, association de malfaiteurs et extorsion.
Lundi, le ministère public avait détaillé "le presque club des Cinq" du clan corse, organisé autour du "chef incontesté et incontestable", Jacques Santoni, de ses bras droits, Michael Ettori, "le comptable" et Pascal Porri, l'ami "à la vie à la mort" du chef, et de "l'homme de l'ombre", André Bacchiolelli. Les quatre prévenus, en récidive légale, encourent 20 ans de prison.
Il a décrit également, à l'aide de la lecture de nombreuses écoutes cryptiques enregistrées dans les cossus appartements parisiens des prévenus, les heures de comptage de billets et "le ruissellement d'espèces" utilisé par ce noyau dur et leurs compagnes pour mener une "vie de palace" avec voitures ou montres hors de prix, restaurants étoilés et marques de luxe à foison.
Mardi, Mathieu Bertola et Isabelle Candau, les deux procureurs de la juridiction interrégionale spécialisée (JIRS), compétente en matière de criminalité organisée, ont plongé dans le "sérail" des hommes d'affaires richissimes corses qui ont interagi avec le clan pour, selon les magistrats, blanchir des millions en investissant notamment dans un chalet de Courchevel.
Via ces intermédiaires, "le Petit Bar poursuit sa mue vers des affaires à grande échelle", a souligné Isabelle Candau.
Banque aux Bahamas ou à Francfort, holding à Singapour ou au Luxembourg, sociétés immobilières en Suisse, intermédiaires en Bulgarie et en Israël, rencontres à Bruxelles, Cavallo -l'île corse des milliardaires- ou Courchevel: découpé en quatre actes, à l'image d'une pièce de théâtre judiciaire avec ses acteurs principaux, le réquisitoire a fait le tour du monde.
De Courchevel à Aubervilliers
Premier acteur: François-Xavier Susini, commerçant aisé installé à Courchevel, en passe de réaliser deux opérations d'importance, la surélévation du toit d'un garage d'une vaste copropriété pour y construire des logements destinés à l'hébergement de salariés saisonniers et la construction d'un chalet hyperluxueux de 800 m2.
Selon l'accusation, Antony Perrino, poids-lourd de l'immobilier en Corse et "ami d'enfance" de plusieurs membres du Petit Bar, va alors contacter Jean-Pierre Valentini, un Corse vivant entre Dubaï et la Suisse après avoir construit une fortune colossale dans le trading du pétrole en Afrique.
"Antony Perrino va faire entrer Jean-Pierre Valentini auprès de François-Xavier Susini pour financer les affaires", assure Isabelle Candau, qualifiant M. Perrino de "prête-nom du Petit Bar" et expliquant qu'à plusieurs occasions "Antony Perrino et Michael Ettori sont totalement interchangeables".
Ainsi, un premier virement de 1,2 million est parti en juillet 2019 du compte de Singapour de Jean-Pierre Valentini vers le compte professionnel de l'avocat de François-Xavier Susini, en règlement d'un prêt obligataire.
Les procureurs ont également décrit "le système de blanchiment" effectué par des "Chinois d'Aubervilliers", assurant que même si "les flux sont difficilement traçables", il est avéré que "700.000 euros sont passés des comptes de Valentini aux comptes des Chinois, qui ont ensuite atterri dans les mains de Michael Ettori et donc du Petit Bar".
Concernant le blanchiment, "tous ces éléments vont devoir vous amener à entrer en voie de condamnation", a déclaré au tribunal la procureure, avant d'évoquer le volet extorsion du dossier.
Des "menaces et pression ont débuté en 2019" contre Jean-Marc Peretti, riche homme d'affaires et "marchand d'art", pour "une dette de deux millions d'euros" que le Petit Bar lui demande de rembourser, a pointé la procureure. Quatre prévenus dont trois du noyau dur du Petit Bar sont poursuivis dans ce volet.
Le réquisitoire doit s'achever mercredi avec les peines requises contre les 24 prévenus, dont quatre sont en fuite, avant les plaidoiries de la défense à partir de mardi 6 mai.
© Agence France-Presse (par M. Cofflard)
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