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Alcool chez les jeunes : le rôle des réseaux sociaux pointé du doigt

4min

Par Maritima 26/09/2024 à 20:10

Milliers de contenus valorisant l'alcool, incitation à la boisson faite par des influenceurs, algorithmes ciblés...: les réseaux sociaux constituent un "nouveau far west" pour la promotion de l'alcool auprès des jeunes, sans régulation efficace, dénoncent des associations.

Entre juin 2021 et janvier 2024, Addictions France, qui mène des actions de sensibilisation et prévention pour tout type d'addictions, a dénombré pas moins de 11.300 contenus de ce type sur des réseaux comme Instagram et TikTok, émis par 802 marques d'alcool et 483 influenceurs.

"L'exposition des jeunes à l'alcool sur ces réseaux est majeur", a alerté jeudi Bernard Basset, le président de l'association, en présentant les résultats d'un rapport mené avec l'aide de l'association Avenir Santé.

Sur ces plateformes, qui ont pris énormément d'ampleur ces dernières années, les marques peuvent "pousser les frontières de la créativité pour créer des concepts de publicité attractifs à l'esthétique travaillée", observe le rapport.

Parmi les plus représentées, on trouve Ricard, Heineken et Aperol Spritz, qui proposent des contenus attrayants en associant l'alcool à des thématiques comme la convivialité, la fête, les vacances, la mode...

 

Association avec des influenceurs

 

Autre exemple, repéré par Addictions France: celui du gin Bombay Sapphire, appartenant au groupe Bacardi-Martini. Avec 340 contenus relevés en trois ans, la marque s'est rendue en peu de temps extrêmement visible auprès de la jeunesse, souligne l'association.

Pour toucher le maximum de personnes, ces marques choisissent souvent de s'associer à des influenceurs, qui acceptent des collaborations commerciales pour promouvoir leurs produits.

A l'instar de l'influenceuse Lenasituations qui fait régulièrement la promotion de l'alcool par des partenariats, auprès de ses 4,6 millions d'abonnés, pointe le rapport.

Or quand les méga influenceurs, qui ont plus d'un million d'abonnés, arrivent à toucher des communautés très larges, les plus petits ont généralement une communauté très engagée.

"L'investissement des industriels de l'alcool est massif", a dénoncé jeudi Franck Lecas, responsable du pôle "projets politiques publique" chez Addictions France.

 

Sanctions dérisoires

 

"Contenus beaux et agréables, publicités intrusives qu'on reçoit sur son fil entre deux stories, selfies d'influenceurs pris dans des soirées sponsorisées...:  25% des jeunes ayant vu ce genre de contenus disent avoir envie de consommer", a-t-il mis en garde.

Selon une étude de l'École des Hautes Études en Santé Publique réalisée dans le cadre du projet de l'association, 79% des 15-21 ans voient des publicités pour de l'alcool toutes les semaines sur les réseaux sociaux.

Or la loi Evin, qui encadre le marketing et l'alcool, est aujourd'hui insuffisante, selon Addictions France.

Adoptée en 1991, quand les réseaux sociaux n'existaient pas, cette loi avait pour principal objectif de créer un environnement plus favorable à la santé, en particulier des plus jeunes.

Depuis, "elle a subi un certain nombre de coups de boutoir", pâtissant du lobbying actif des producteurs d'alcool, a relevé Claude Evin, ancien ministre de la Santé à l'origine de cette loi.

Et la loi de juin 2023 encadrant l'activité des influenceurs a été une occasion ratée, a déploré Addictions France, en ne leur interdisant pas de faire de la publicité en faveur de l'alcool. Elle leur a simplement rappelé qu'ils devaient respecter la loi Evin.

 

"Rien n'a changé"

 

"Un an après cette loi, rien n'a changé; il faut revenir à l'esprit d'origine de la loi Evin et interdire toute forme de publicité pour l'alcool sur les réseaux", a insisté Myriam Savy, directrice du plaidoyer pour Addictions France.

La loi "influenceurs" a mis en place une brigade de 15 agents chargés de surveiller les contenus (tous sujets confondus) de 150.000 créateurs de contenus. Des moyens "clairement insuffisants", dénonce l'association.

Si les procédures judiciaires qu'elle a engagées se sont soldées par des victoires dans 85% des cas, ces actions restent longues et complexes. Quant aux sanctions prononcées, elles sont "non dissuasives", regrette l'association.

L'amende maximale encourue pour les infractions à la loi Evin s'élève en effet à 75.000 euros, un montant "dérisoire" pour des groupes industriels investissant des dizaines de millions d'euros dans leurs campagnes publicitaires, illustre-t-elle.

 

© Agence France-Presse - I. Tourné

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