S'il y a un vêtement emblématique à Marseille - mais attention, revendiqué comme tel également par les Corses - c'est bien le bleu de Chine. 
Ce robuste ensemble veste-pantalon, à l'origine à vocation professionnelle, qui débarque sur les quais marseillais au début du XXe avant de devenir une fringue à la fois mainstream et identitaire dans les années 70, est aujourd'hui dépassé voire surclassé dans le coeur des jeunes générations par d'autres tissus compatriotes venus, eux, tout droit de Shein. 
Des compatriotes qui lui en font voir de toutes les couleurs, et pas seulement l'indigo.

Eh oui, la marque Shein (prononcer "Chi-Ine") écrase toute la concurrence en mode bulldozer. 
Notamment grâce à des milliers d'articles renouvelés quotidiennement à une cadence infernale, à des prix hyper modiques et à des opérations de com à l'image de cette "pop-up", comme on désigne désormais une boutique éphémère, qui a ouvert ses portes mardi pour baisser le rideau dimanche. Mais certainement pas définitivement. 

Un succès qui n'est pas sans conséquences tant sur le plan environnemental que social, ce que dénoncent plusieurs associations marseillaises qui se sont rassemblées aujourd'hui en fin de matinée devant les portes du World Trade Center où se déroulait l'opération promotionnelle afin de justement sensibiliser les clients de la marque.
Un WTC où l'on ne pénétrait pas comme dans un moulin : inscription préalable sur internet et fouille des sacs à l'entrée par un service de sécurité conséquent. Pour autant, des deux côtés, tout s'est passé sans heurts et avec la plus extrême civilité, ce qui en cette période vaut la peine d'être souligné.
Des représentants de la marque estimaient à plus de 10000 le nombre de visiteurs accueillis dans la boutique à l'issue des six jours.

En vidéo : 
les interviews de Fiona Cosson, fondatrice et directrice de Zero Waste Marseille ainsi que de Valentin Robert, militant d'Alternatiba Marseille. Les deux associations évoquent le bilan humain, social et environnemental du géant textile chinois qu'elles estiment catastrophique ainsi la loi dite "fast fashion" qui tarde à être présentée au Sénat

Charlotte Labigne du collectif Baga rassemblant les actrices et acteurs de la mode écoresponsable à Marseille et en région Sud ainsi que Jocelyn Meire, président de Mode in Sud, le syndicat régional des entreprises de mode évoquent tous les deux l'alternative à l'invasion venue de Shein.

Chiffres clés fournis par les associations 

• Plus de 100 milliards de vêtements sont vendus dans le monde

•  Moins de 1 % des fibres utilisées pour produire des vêtements est recyclé en vêtements neufs. (Fondation Ellen McArthur)

•  En France, 715 000 tonnes de TLC (Textiles d'habillement, linge de maison et chaussures) sont mis sur le marché (2,8 milliards de pièces) soit plus de 10 kg par an et par habitant. Seulement 3,4 kg de TLC par habitant sont triés

•  Un jean peut parcourir jusqu'à 65 000 km du champ de coton à la boutique

• 22 000 personnes décèdent chaque année à causes des pesticides nécessaires à la culture du coton

•  64 % des vêtements qui peuvent encore être portés sont jetés. (Atlas du plastique)