"J'imaginais un immeuble désaffecté..." Le souvenir intact de notre reporter

 

Présent sur les lieux il y a 7 ans, notre reporter Michel Montagne a partagé son propre souvenir de cette matinée tragique. Habitant lui-même La Plaine, à quelques centaines de mètres, il a été alerté par un collègue photographe.

"En descendant les escaliers du Cours Julien, j'imaginais un immeuble désaffecté", raconte-t-il. "Et là, on s'est retrouvés bloqués à 100 mètres. On a vu cet amas de roches, de terre... Mais même là, on n'imaginait pas un drame. Et puis, au fil de la journée, il y a eu ce décompte funèbre." Un souvenir qui, comme pour beaucoup de Marseillais, reste gravé, tout comme "ces pompiers qui fouillaient les gravats avec leurs bergers allemands cherchant les corps".

 

 

Huit minutes de silence, une douleur éternelle

 

Ce matin, l'émotion était palpable lors des huit longues minutes de silence, une pour chaque victime, avec dans l'assistance huit personnes portant chacune un flambeau. Les familles des victimes, présentes et dignes, ont rappelé que la blessure ne s'est jamais refermée.

L'un des moments les plus poignants fut la prise de parole de la mère de Simona, la plus jeunes des victimes. Elle a tenu à remercier les marins-pompiers, "ces hommes qui ont été les dernières personnes à tenir ma fille dans leurs bras", là où elle-même n'avait pu le faire.

 

 

"On ne comprenait pas..." : le choc des voisins

 

Michel Montagne a également recueilli le témoignage de Mohamed, un voisin direct qui se trouvait à une cinquantaine de mètres lors de l'effondrement. "On était sidérés, on ne comprenait pas", se souvient-il. "Même en étant sur place, en prenant la poussière des immeubles, nos yeux voyaient mais notre cerveau ne comprenait pas. On se tenait la main, on attendait."

 

La colère face à la justice

 

Sept ans après, à la douleur se mêle toujours une "colère froide". Le procès qui s'est tenu en 2024 a laissé un goût amer à beaucoup. Yves Doazan, membre du Collectif du 5 Novembre, n'a pas tourné la page. Pour lui, ce drame est le symbole de l'échec des politiques publiques face aux "marchands de sommeil" et au logement indigne.

Un sentiment partagé par Sandra Comptour, architecte et urbaniste, également présente ce matin. Elle exprime son incompréhension, notamment face à l'acquittement de Marseille Habitat. "C'est un très mauvais exemple pour la profession", déplore-t-elle, rappelant que les expertises avaient pointé des manquements graves.

Pour les familles et le collectif, le combat continue en appel. Ils espèrent désormais que la "dent creuse", ce trou béant laissé par les immeubles, deviendra, comme l'a rappelé la mère de Julien, "un lieu de vie" et de mémoire.